Empreintes de la culture francophone en Amérique du Nord
Le 24 juin, à l'occasion de la Saint-Jean-Baptiste, on célèbre la présence francophone au Québec et dans les communautés au Canada. Découvrez trois autrices et auteurs qui s’inspirent des événements historiques et des personnages appartenant à la culture francophone présente en Amérique du Nord.
La Souillonne de Normand Beaupré (Maine, États-Unis)
Natif de l'État du Maine aux États-Unis, Normand Beaupré a enseigné à l'Université de la Nouvelle-Angleterre pendant 30 ans. Il a à son actif plus de vingt romans et pièces de théâtre. Publié en 2005 par Illumina Press, La Souillonne est un monologue pour la scène. Normand Beaupré y brosse le portrait de la Souillonne, personnage qui incarne l’identité des femmes franco-américaines. Il dédie son monologue à Antonine Maillet, l’autrice acadienne qui a créé le fameux personnage de la Sagouine.
La Souillonne est le produit de l’imagination de Normand Beaupré qui a observé son entourage et sa famille. Elle représente la femme-épouse-sœur-belle-sœur-tante-cousine qu’il a connue en vivant dans une ville de l’État du Maine. Normand Beaupré est attaché à son héroïne : «Elle a la sagesse des gens ordinaires que leur vivacité d’esprit rend quelque peu extraordinaires. Je vous la livre comme elle est sans embellissement, sans retouches. Elle est assise sur la chaise berçante au milieu de la cuisine; elle se berce tout en racontant ses histoires à elle. Ce sont des histoires vraies.»
Le langage de la Souillonne emprunte au registre populaire et familier du français tel qu’on le parlait au XIX siècle au Canada français et tel qu’on peut l’entendre encore parfois. Elle contracte très souvent les mots (A’ l’aimait pas ça ou encore y’a mouillé pour il a plu), ajoute des lettres (plusse pour plus) et jongle d’une manière naturelle aussi avec les anglicismes (I’ nous appelaient leurs hands, I’ les faisait runner ces métiers).
L’avenir de Catherine Leroux (Québec)
Après avoir exercé divers métiers, dont celui de journaliste, Catherine Leroux est autrice et éditrice québécoise. Publié en 2011 La marche en forêt (éditions Alto), finaliste au Prix des libraires du Québec, est son premier roman. Le mur mitoyen (éditions Alto), paru deux ans plus tard, a été couronné du prix France-Québec, et sa version anglaise a été en lice pour le prix Scotiabank Giller. Son recueil de nouvelles, Madame Victoria (éditions Alto), a remporté le prix Adrienne-Choquette 2016.
Paru en 2020, L’avenir (éditions Alto) est le fruit d’une recherche, longue et détaillée, sur l’histoire de la ville de Détroit et de la francophonie du sud de l’Ontario. L’avenir est un roman «de spéculation et d’invention», selon Catherine Leroux. L’autrice s’inspire des documentaires et des ouvrages ethnologiques consacrés à la ville de Detroit, initialement baptisée le Fort Pontchartrain du Détroit et fondée par Antoine de Lamothe-Cadillac, ministre de la Marine de Louis XIV. Elle y évoque les caractéristiques géographiques et historiques de Détroit sur lesquelles elle greffe l’histoire de ses personnages entièrement imaginaires. Le lecteur découvre les aventures de Gloria, la mère endeuillée, d’Eunice, sa voisine curieuse, de Salomon, agriculteur et à la fois grand connaisseur d’histoire ainsi que du groupe d’enfants sauvages qui vivent en autonomie dans un boisé. Tous les personnages parlent français à Détroit! Catherine Leroux en écrivant ce roman a dû amorcer une réflexion sur la question de la langue qu’elle souhaitait attribuer à ses personnages :
Considérant qu’il existe des différences marquées entre le français du Québec, des Maritimes, de l’Ontario et des Prairies, il m’a soudainement paru absurde d’attribuer à mes Détroitfortins le même dialecte que celui que je parle moi-même (Forger la langue de Fort-Detroit).
Will & Ernest de Martine Noël-Maw (Saskatchewan)
Éditrice, traductrice et dramaturge, Martine Noël-Maw est d’origine québécoise et demeure en Saskatchewan depuis 1993. Autrice de plus de quinze romans dédiés aux jeunes comme aux adultes, elle s’inspire principalement de faits et de lieux liés à sa province d’adoption. Écrire lui permet d’allier trois activités : la recherche, l’écriture et les voyages.
C’est en écoutant le documentaire Alias Will James de Jacques Godbout, auteur et cinéaste québécois, qu’elle a découvert l’histoire d’Ernest Dufault, alias Will James. Ernest Dufault (1892-1942) est un Québécois, dessinateur et auteur d’une douzaine de romans qui a passé sa vie adulte aux États-Unis. Il est devenu l'incarnation du cowboy de Hollywood et de l'Ouest américain en effaçant son passé franco-canadien. Martine Noël-Maw confie dans son Portrait d’auteure, l’entrevue accordée à la Bibliothèque des Amériques : « Quand j’ai su que ce héros américain était en réalité un p’tit gars de Saint-Nazaire d’Acton, au Québec, j’ai voulu écrire un roman jeunesse pour faire découvrir ce personnage haut en couleur, méconnu dans la francophonie. De fil en aiguille, le roman a bifurqué vers le théâtre. Cinq années de recherche et d’écriture ont abouti à la pièce. »
L’action de Will & Ernest (éditions de la Nouvelle plume) se déroule à Los Angeles, en 1942, au cours des derniers mois de la vie de Will James qui décide de dévoiler son identité. Will & Ernest a été créée par La Troupe du Jour de Saskatoon (Saskatchewan) en février 2020.